mercredi 27 février 2013
samedi 23 février 2013
09 - Farid (partie 2/3) : Culotté
Drinn......dring.
Un coup long, un coup bref...ça me rappelle quelque chose. Mon esprit,
occupé sous la douche, ne se souvient plus trop de quoi. Silence à
nouveau. Et re... Insister si lourdement m'énerve tant :
- Oui ?
- C'est moi !
- Qui, moi ?
- Farid.
Blanc
de conversation. Quelle suite donner ? Son silence de trois semaines.
Sa silhouette un peu courbe en haut du rempart. Son dos qu'il me laisse
voir et qui m'ignore. Les petites larmes versées tandis qu'il s'éloigne
de sa démarche lourde... Tout cela me gifle. Une politesse (de celle des
esclaves, sans doute, toute en apparence calculée) me force à lui
ouvrir néanmoins. J'appuie sur le bouton de l'interphone.
Il
pousse la porte, entre, me tend à peine la main et s'étale sur le
canapé. Et allume une cigarette. Rester debout, à bonne distance... Tu veux du thé ?
Il ne veut pas de mon thé. Il écoute à peine mes réponses à ses
questions de diplomate. Il veut mon corps. Refus. Mots brefs, gestes
secs. Vexé, déjà à la porte. Puisque je te dérange... Lui ai-je seulement dit au revoir dans ce silence du vestibule ? La porte refermée, cornac orphelin.
jeudi 21 février 2013
08 - Farid (partie1/3) : Triste fin
Aperçu
de loin, samedi. Hésitant. Un doute quant à cette silhouette,
néanmoins. Pourtant, cette nonchalance, cette lenteur calculée... La
courbe si particulière de ce dos... Comme la distance s'amenuise, le
flou se précise. Depuis quinze jours qu'il ne donnait signe de vie !
Enfin, le revoir ? Mon regard suit la noblesse de sa marche. Il ne suit
pas un trottoir mais foule un désert ! Myope, il ne pense pas à moi.
Quelques
mètres enfin... Mais, n'est-ce pas une murène qu'il arbore à son cou –
prête à mordre qui le repèrerait ? Enfin, il comprend : et pour ne pas
exister sous mon regard, alors tourne-t-il la tête avec dédain.
Détournant la tête, Farid nous condamne.
Insupportable,
intolérable, inadmissible. Non-supporté, non-toléré, non-admis. Non,
non et non. Aucune fin n'est victorieuse de rien. Celle de cette
liaison-là pas plus qu'une autre. Perdu au milieu d'une nage, chercher
un souffle semble impossible. Pourtant...
lundi 18 février 2013
43 – Permission 81
Le
même froid qu'à ce jour. Au sein d'un hiver sans nom, le quai de gare à
tous vents me fige les os. Il descend du wagon, habit kaki, rangers
noires. Ses extraordinaires cheveux raides longs et noirs lui ombrent
désormais le crane. Il revient d'Allemagne, une permission rare qui me
le rendait précieux.
Les
volets empêchent le monde de nous divertir. Au sol – repus, allongés,
enfin détendus – à nos côtés, deux ou trois bougies éclairent nos
différences. Autour d'un jeu de cartes qui ne nous distrait pas, nos
gestes maladroits trahissent mal l'impatience que cette soirée s'achève.
Secrètement, lui et moi espérions que la nuit commençât enfin. Longue
attente de nos fatigues.
Je
ne sais plus qui – lui sans doute – s'avoua vaincu... Ce soir-là de
janvier 1981 s'inscrit à jamais dans une Antiquité des souvenirs.
Lumières éteintes, oui ça, c'est sûr. Lourdes couvertures épaisses
aussi. Nos corps nus écrasés sous leur poids. Le noir total, mon cœur
s'emballe – boum-boumboum-boum – dans le froid silence du studio.
Lui
se penche sur moi. Premier baiser – enfin ! – si fantasmé depuis mes 16
ans ! Nos peaux lissent l'une sur l'autre, un délicieux désordre
maladroit s’installe qui réordonne – toujours, les premières fois – le
lit. Au réveil, Pierre-Marie pose sur nos draps le plateau du
petit-déjeuner. Dans cinq heures, son régiment me le réclamera. Eperdus,
égarés dans nos vingt ans, cette toute première nuit partagée, volée à
nos éducations, n'a pas survécue -- sinon dans ma mémoire -- aux
soubresauts de leurs menaces. Recroquevillé sur moi-même, le regard au
dessus de l'épaule gauche, je scrute avec hantise un passé qui me
mordrait les fesses. Si le même hiver et le même froid, les mêmes volets
hermétiquement clos, savent réduire trente années d'errances en un
souvenir d'une fraction de seconde, alors le train en provenance de
Karlsruhe ne devrait pas tarder à entrer en gare, n'est-ce pas ?
J'attends donc, le corps encore gelé -- mais les yeux clos dans le noir
de cet appartement de 2013 -- qu'il ne bondisse sur le quai, habit kaki
et rangers noires. Pierre-Marie, ce soir, me manque cruellement.
samedi 16 février 2013
mercredi 13 février 2013
07 - Merci merci merci
Merci
Madame le Ministre pour la force de votre projet de loi. Pour la
politesse de votre détermination à conduire ce projet jusqu'au vote de
mardi 12 février.
Merci Madame le Ministre pour la dignité de vos mots. Pour leur intelligente sémantique. Pour votre admirable capacité de résistance à la bêtise humaine.
Merci
Madame le Ministre pour la beauté de vos raisonnements. Merci enfin
pour la qualité et la délicate beauté de vos convictions personnelles et
collectives.
Discours de
Christiane Taubira, Ministre de la Justice, en date du mardi 29 janvier
2013 inaugurant le débat à l'Assemblée Nationale.
dimanche 10 février 2013
21 - Airs (of) graves
Un
sourire kabyle moins sanglant que ces blessants silences ? N'avoir
retenu que des cous à la peau duveteuse, soyeuse forcément et juvénile
malgré tout : une vengeance ignoble. En quoi consiste ma traitrise ?
Chaque fois que je me retourne, dans mon dos, ces ailes dont chaque
plume porte le nom d'un de ceux-là, terrassé. Foudroyé dans l'élan de sa
pauvre jeunesse de pauvre. Fichu en terre, moribond – comme planté –
agonisant va-nu-pied, fauché d'un coup de rein innocent. Empalé par un
ange aux ailes tristes.
Parmi
les épitaphes, quelques-unes remémorent des sourires, vagues désormais,
presque effacés de ma mémoire. N'en reste que les ombres, évanescente
idée, oui. L'idée du sourire de celui-là, pétrifié la veille de nos
jeunes printemps. Où donc se cachent-ils, ces oubliés ? Quelles allées
caillouteuses remonter pour de nouveau les rencontrer ?
Les
cimetières suintent – transpirent, respirent, aspirent à – ces airs
graves. Ces travées-là, trop exiguës pour mes ailes douteuses, ne
conviennent qu'à l'étroitesse des cercueils. D'ailleurs, aucun de leurs
larges rires n'éclaire mon présent. Nuageux. Sombre. Obscur. Noir. Si
noir, qu'aucune blondeur ne se risquerait à déranger.
vendredi 1 février 2013
06 - Cygne trouble (partie 3/ ? : Les yeux miel)
Les
fêtes passées, mails traditionnels de bons vœux. A lui, je ne sais plus
quoi. Des mots polis, policés, lissés. Si neutres : à quoi bon attendre
un retour ? Aucun espoir de ce côté. Il m'avait dit être jeune, pas
encore bachelier, tout juste majeur. Trente années ne sont plus un
écart, un gouffre plutôt. Du genre incommensurable.
Et
puis sa réponse ! Chantournée, ciselée au mot près, aimable : tout va
bien, lui aussi. De vagues excuses pour son long silence. Un identifiant
pour un site de tchat. Soit, va pour le tchat ! Son vrai nom apparaît
enfin mais qui est-il ? Que cache ces yeux couleur miel ?
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