mercredi 29 juin 2011

14 - Se taire


14 - Se taire
Fini le petit garçon inquiet des hommes ! La puberté passée, tout semble devoir s'allonger à l'infini. Dans les douches, mes camarades de dortoir sifflent d'admiration devant la longueur de mon sexe. J'appartiens à une bande de potes, tous aimantés par le dortoir des filles. Ces mêmes filles qui raffolent de ma tignasse blonde bouclée : Robert Plant tout craché ! Sous le préau, les grands de Terminale s'amusent de me voir déjà fumer comme eux des Gitanes sans filtre, manifester comme eux contre les lois Haby, plaisanter comme eux auprès des filles pour les draguer. Mes professeurs, en sixième et cinquième pourtant si inquiets, ne se lassent pas de compliments. On ne me brime plus à l'internat que je suis même parvenu à changer en port d'attache, havre de paix presque pour échapper aux tempêtes familiales.
14 - Se taire
C'est la nuit que les choses se compliquent. Quand tout le monde dort sauf soi. Quand la journée défile devant ses yeux. Repenser à toutes ces stratégies déployées pour leur plaire. Imaginer d'autres diplomaties, pas les bousculer dans leurs certitudes. Ces efforts-là ne sont pas compliqués à tenir (Thierry m'a beaucoup appris ). Ce qui est vraiment angoissant, c'est de ne pas savoir quand et comment on va pouvoir être ce qu'on a envie de devenir depuis si longtemps.
14 - Se taire
D'avoir commencé ma vie sexuelle à 10 ans et demi m'a jeté dans la pire des débauches, pensiez-vous ? Pas du tout ! De ma rentrée en Sixième à cet âge-là jusqu'à ma sortie de Terminale à 17 ans et demi, en huit années d'internat (j'ai doublé ma seconde), je n'ai couché qu'avec un seul camarade (hormis Thierry, bien entendu). C'était purement sexuel car il n'était vraiment pas beau et c'est lui qui avait insisté lourdement.
Par contre, je suis tombé raide amoureux dingue de quelques autres. Sourds et moi muet.

mardi 28 juin 2011

13 - Orphelins


De la meute qui s'écharpait en cette fin d'après-midi de septembre, un peu lourde des restes de l'été, il était là, au centre de tous, immense, paisible, très sûr de lui. Il était déjà en cinquième, avait redoublé sa sixième. Un grand, quoi !
13 - Orphelins
Nos regards se sont croisés. Aucun mot prononcé. Il m'a plu. Je n'ai jamais su comment il s'était débrouillé pour arrimer son lit dans mon box, au dortoir. Thierry a été beaucoup de choses à la fois durant les deux ans qui ont suivi : un frère, un père, un amant.
13 - Orphelins
Entrer dans l'adolescence. Quitter l'enfant que j'étais encore en cette rentrée en sixième dans cet internat de province. Trouver un feu pour chauffer mes jeunes os, me guider dans ce bordel immense qui s'annonçait. Il a fait tout ça. Pour moi. Que pour moi. Orphelin de père, il a été un vrai tuteur. Le mien me manquait, il l'a remplacé.
13 - Orphelins
Thierry jouait les durs. J'aimais Pink Floyd et les livres. Il adorait Ted Nuggent et la mécanique. Il a quitté très tôt, en quatrième, l'école pour la vie active. J'ai poussé jusqu'au bac et plus. A 20 ans, bien que déjà père de famille, il acceptait encore de partager ses nuits avec moi, bachelier en herbe. Il était caparaçonné de certitudes. J'étais nu, ceint de doutes et d'angoisses.
Il est mort à 30 ans, bêtement. Je vis encore, bêtement.

lundi 27 juin 2011

09 - Ekstatikos


11 - EkstatikosIl y a des moments magiques, comme ça. D'où ? De quand ? Pourquoi ça vous déclenche comme ça des sortes de frissons extatiques ? Franchement, j'ai toujours pas compris comment ça fonctionne. Ce qui me rassure, c'est que c'est un mystère pour tout le monde. Bien crétin (ou prétentieux ou vaniteux ou ambitieux) celui qui prétendrait détenir un tel savoir.

Et c'est un de ces moments d'extase, divin car il vous bombarde illico dans un si lointain passé – et en même temps vous le présente si proche à votre mémoire ! – que j'ai ressenti en papillonnant sur ce blog d' André Depinge.

11 - Ekstatikos
Une rare impression...un peu comme la pression de la main paternelle qui tenait la mienne lors des promenades en ville. Et cette même – rare – douleur de la conscience indicible que la promenade aura une fin. Une fin inéluctable...que les sons cadencés de nos pas ne résonneront plus jamais ensemble. Et j'ai beau m'acharner, les soirs de colère, à marteler le sol de mes talons rageurs : rien ne viendra plus combler ce silence mortel de mes promenades d'orphelin.
Merci André pour ce moment très très rare.      11 - Ekstatikos
                                   

samedi 25 juin 2011

12 - Oser


La dame m'observait d'un œil en coin. Une demi-heure de marche il m'avait fallu pour quitter la Cité Scientifique,12 - Osertraverser Ascq et trouver enfin cette maison de la presse à Annapes. La dame se tenait derrière sa caisse et soupirait souvent. Pas vieille, plus jeune. Elle m'a d'abord fait repenser à ma mère. Ce qui m'a obligé à me diriger vers le rayon des mots croisés. Le temps que des clients inopportuns paient leurs achats, causent un brin et se décident à sortir.
 
Alors mon regard se levait vers les rayonnages « réservés aux adultes ». J'y avais aperçu, la semaine d'avant, cachée derrière les couvertures habituelles de seins en obus et de bouches pulpeuses écœurantes, un bout d'épaule moins lisse, plus musclé qui laissait supposer une virilité nue.
12 - Oser
Depuis une semaine, je fantasmais ce morceau de couv'. Revenu à Maubeuge pour un week-end en famille, je n'avais pas osé aller voir ça au kiosque de la gare de peur d'être reconnu. Aussi, ce lundi-là de novembre 1980, je séchais les cours de l'après-midi, bien décidé à oser tendre la main pour la première fois vers ce magazine inconnu, scandaleux, interdit.
12 - OserIl m'en a fallu du temps pour oser. Et quelles heures palpitantes n'ai-je passées ensuite avec mon trésor de papier glacé dans cette minuscule chambre d'étudiant ! Mon premier magazine homo : Jean-Paul il s'intitulait.

mercredi 22 juin 2011

11 - Fascination


11 - FascinationOctobre 1980, première rentrée universitaire. Il ne me faudra pas longtemps pour me retrouver hypnotisé par les urinoirs du sous-sol, face aux amphis de Langues Etrangères. Au point de rater des cours pour y séjourner des après-midis entiers.
La vue de la porte d'entrée. Les sons des couloirs qui s'étouffent dès son passage. L'odeur très particulière qui durcissait l'intérieur de mon sexe dès que je tournais sur la gauche, vers les pissotières alignées le long d'un mur de faïence blanche. L'idée d'y voir de dos, jambes écartées, les deux mains plongeant vers le centre de son corps, un étudiant. Huit années d'études et des rencontres fabuleusement sexuelles malgré les peurs des années 80.11 - Fascination
C'était un mercredi en début d'après-midi. Je revenais d'une séance de sport où les douches m'avaient tellement échaudé l'esprit avec tous ces corps embués... Le cours de littérature comparée m'a semblé superflu. J'ai conduit mes pas vers ce sous-sol, face aux amphis de Langues Etrangères...

11 - Fascination

Et, tel un tatouage indélébile, le premier de tous : tout en jeans, le dos vouté, arqué sur son sexe lourd de trentenaire. Il me semblait vieux mais viril. Moustachu. Attirant. Le premier qui a voulu me prendre. Le premier qui est e

mardi 21 juin 2011

10 - Mayenne 86


10 - Mayenne 86Juillet 1986. Je traverse le pays en stop pour les vacances, vers l'ouest. Un camion me dépose dans la région de Pré-en-Pail. Je marche afin de trouver un endroit de la route aisément praticable si une voiture veut bien me prendre. Quelques centaines de mètres et je dépasse un chariot de ballots de paille, le long d'une grange en bordure de nationale. Au dessus de la remorque de paille, un homme en baskets et maillot de bain noir. Juste ça. La fourche à la main, il balance les ballots rectangulaires en faisant bouger tous ses muscles.
L'image est admirable : je m'installe non loin de là. Tous les trois ou quatre ballots lancés, il fourrage généreusement son maillot d'une main déterminée... Je crois apercevoir une ombre tubulaire prometteuse...
10 - Mayenne 86
Le fermier en question se prénommait Pascal. Un monsieur de 39 ans. Gentil. Beau. Homo et sacrément en manque dans son patelin paumé... Je suis resté la moitié de l'été, hébergé dans sa grange. Le premier homme que je rencontrais qui se dise ouvertement marié, père de famille et homo. Trois semaines à soustraire mes 27 ans de ses 39 m'ont appris cent fois plus que tous les articles à la con que j'avais pu lire dans la presse de l'époque.
Le dernier été de liberté. L'année suivante, sans que je comprenne quoi que ce soit, j'étais marié et en passe d'être papa !

dimanche 19 juin 2011

09 - L.S.D. 08/12/1980


09 - L. S. D. 08/12/1980
J'allais fêter mon vingtième anniversaire. Il neigeait. Dans une atmosphère d'hiver, un peu frisquet, un peu désert, mon cours de culture latine du mardi 09 décembre de 09h00 à 10h30, un peu chiant, ronronne. Il est 09h30 environ lorsque les portes battantes de l'amphi s'ouvrent en grand avec fracas et interrompent le vieux professeur. Tout le monde se retourne vers le haut de l'allée : un jeune homme, la mine catastrophée, s'écrie : « John Lennon a été assassiné ! »09 - L. S. D. 08/12/1980
Le cours s'est arrêté dans un silence glacé. La matinée s'est arrêtée dans un silence glacé. La journée s'est gelée dans un silence glacé. Une partie de mon enfance et de mon adolescence venait de s'éteindre.
Le New York Post titre : " John Lennon Shoot Dead". 3 lettres qui l'ont poursuivi longtemps.

09 - L. S. D. 08/12/1980

10 - Ecrire

Et il a bien fallu réapprendre à être. Autrement. Différent. Le plus difficile, c'est les autres. Surtout s'ils sont proches.
10 - EcrireOctobre 2001 : sur le chemin de cette renaissance, j'ai éprouvé le besoin vital de dire les choses, le plus simplement possible, à mon fils. Je ne l'ai pas fait directement. Il aurait été en âge de comprendre. Je n'ai pas voulu lui imposer cette défaite. Mon propre père ne m'a pas appris à faire ça. Alors je lui ai écrit un cahier. Et puis deux. Il les lira plus tard. Sans doute à ma mort. Ou lorsque mon mogwaï aura décidé de se manifester de manière irréversible et visible. Lui écrire quoi, donc ? Hé bien, juste essayer de lui expliquer comment on peut être homo et que c'est pas incompatible avec l'état de père...et que le mogwaï vient compliquer tout ça.

samedi 18 juin 2011

08 - Masters



08 - Masters
Dans le détail, tenter d'expliquer en quoi il a bouleversé ma vie ? Littéralement impossible ! Mais il n'a été le seul durant mon parcours scolaire. Monsieur V. en 1967 qui se penchait sur mon cahier pour m'indiquer les erreurs d'un doigt bienveillant. Monsieur B. , en quatrième, trouvait que mes cheveux de beatnik de 1974 sur les oreilles gênaient ma compréhension. En Terminale, Monsieur E. qui a su me faire découvrir derrière ses cours d'économie, autre chose que l'économie.
En chacun, j'ai trouvé un petit morceau de mon père, je le sais bien aujourd'hui. Et je leur conserve en retour une tendresse infinie.

« The way you made them suffer
Your exquisite wife and mother
Fills me with an urge to defecate
But my friend you have revealed your deepest fear
I sentence you to be exposed before your peers
Tear down the wall »

08 - Masters











Ces derniers vers de The Trial de Pink Floyd traduisent exactement le désarroi dans lequel je me noyais. On est en 1982 et je rentre à l'université de Lille III. Parce qu'il a été le dernier de mes pères ? Parce que, de tous, il a été le plus brillant ? Parce que son regard torve et moqueur m'impressionnait ? Parce que ses critiques étaient sans concession et souvent justes ? Parce qu'il a accepté d'être mon directeur de mémoire ?
En ce début d'été 2009, j'ai hurlé en silence son décès prématuré.

08 - Masters

Le portrait est extrait du superbe site de Dominique Houyet, photographe. Hélas, malgré plusieurs demandes de ma part, elle ne m'a pas répondu quant à l'autorisation d'utiliser ce magnifique cliché dont elle est l'auteur. Je lui rends donc hommage ici et vous invite à aller sur son site en cliquant sur son logo ci-dessous (ou ci-après si le lien ne fonctionne pas : http://www.houyet-foto.be/index.html) :

08 - Masters

mercredi 15 juin 2011

02 - cuì ( 悴)

Le lit est vide depuis l'autre matin, son train l'a emmené là-bas où le travail l'attend. Le lit est bien triste au réveil de cette sieste, à l'instant, qui emplit de son odeur mes narines.
 Je cherche à tâtons dans la pénombre de la chambre un corps impossible. Maki est parti depuis deux jours et je me réveille seulement.








Peine, tristesse, mélancolie, se dit [cuì] en Chinois. J'éprouve cela, infiniment :

lundi 13 juin 2011

07 - Avatars


07 - Avatars
Premier mec ? Premier amant ? Premier Amour ? Tu parles, Charles ! Joël a été l'Homme de ma Vie, tout simplement. Tout le reste de cette chienne de vie, j'ai recherché l'impression première éprouvée la toute première fois qu'il m'a enlacé.
Lui même, je l'ai revu deux fois. Chaque fois par hasard. La première, en 1976, je rendais une visite de courtoisie à sa mère : il est entré dans la cuisine... Whaaaaa !!!!!.......en marin : il faisait son service militaire à Lorient. En uniforme bleu, le cheveu ras... Craquant mais au bras d'une fille.
07 - Avatars
C'est elle qui l'a marié. Ils vivent encore ensemble, ont eu trois enfants. La seconde fois, il rentrait de son travail et s'était arrêté boire une bière dans un café du patelin... Toujours aussi petit mais, à l'aulne de sa quarantaine bien entamée, il était devenu bouffi et riait stupidement à la moindre plaisanterie du tenancier.... Pathétique !

dimanche 12 juin 2011

06 - Joël un été 1971


06 - Joël un été 1971Il avait 13 ans donc et s'appelait Joël. Peau mate, le cheveu noir de jais, le regard chocolaté. Ses petits bras musclés à peine, fins dépassaient de son maillot bleu foncé. Il portait des nu-pieds et un jean troué à un genou.
J'avais 10 ans et demi et je m'ennuyais ferme dans cette grande maison bretonne, fraiche au cœur de cet été 1971. Blond comme les blés, bronzé, yeux bleus. C'est la cousine qui m'a dit, agacée de me voir trainer à ne rien faire : « va donc voir le petit Joël ! Il habite au calvaire, la maison blanche juste en face. Lui aussi il s'ennuie. Vous jouerez à deux ! »

J'ai pas mis longtemps à le faire sortir de chez lui. Il a fait semblant de bricoler un vieux vélo, a fini par me demander un coup de main pour me forcer à me lever des marches du calvaire d'où je l'observais.
Ses avant-bras étaient tapissés d'un fin duvet de poils noirs et son regard aux yeux noisette obscurci par des sourcils aussi noirs que de l'encre. Je me souviens avoir été « impressionné » par sa beauté. Comme l'est une pellicule par la lumière : ma rétine a reçu sa beauté. Encore aujourd'hui, je le « vois » parfaitement. Chacun des plis de sa peau qu'il m'a peu à peu appris par cœur.
06 - Joël un été 1971
C'est énorme un premier Amour. Même à 10 ans et demi. Joël a orienté toute ma vie. A tel point que dix-huit ans plus tard, c'est à lui que j'ai dédié mon mémoire de maîtrise qui portait sur Jean Genet.

samedi 11 juin 2011

05 - L'été 1971 (partie 2/2)

Attendre éternellement son père, c'est bien. Mais si ça doit durer toutes les vacances, c'est nul ! Je m'ennuie ferme dans ce petit village breton. La mer – que j'adore – non seulement m'est interdite du fait de l'opération du tympan mais en plus, elle est à une vingtaine de kilomètres que ni ma mère ni mon père n'ont envie de parcourir, même de temps à autre.
05 - L'été 1971 (partie 2)
Alors je flâne le long des canaux qui lacèrent cette terre noire et font de ce village une sorte de toile d’araignée lorsqu'on l'observe sur une carte.
Je ne sais plus comment je l'ai rencontré. Je me souviens qu'il m'a proposé une partie de cartes : celui qui perdait devait ôter un vêtement. Le premier tout nu aurait un gage.
Je ne sais plus qui des deux s'est retrouvé le premier nu. Qui des deux a eu son gage. Je me souviens juste qu'il était beau : la peau mate, le cheveu noir, les yeux noisette. Et il avait des poils au dessus de son sexe. Normal il avait déjà 13 ans.
05 - L'été 1971 (partie 2)

jeudi 9 juin 2011

04 - L'été 1971 (partie 1/2)

- « Il est où ? T'es où ? »
Je cherche mon père dans la maison déjà jaune de soleil. C'est la fin juillet, en Bretagne. Mon père, c'est l'inconnue des équations mathématiques, comme on me l'inculquera bien plus tard : on cherche à savoir qui il est, la valeur qu'il a et sans lui, l'équation est idiote...04 - L'été 1971 (partie 1)
- « Va donc porter ce briquet à ton père ! Tu le verras comme ça ! Il est au pont ! »
Avec ma mère, nous avons débarqués chez cette cousine qui nous héberge aimablement dès le début du mois... L'année scolaire a été pénible pour moi car j'ai subi une lourde opération d'un tympan... On m'a prescrit du repos... « La Bretagne ? Très bien ! : le grand air, le large, l'iode... ». Mon père, lui, travaillait encore et n'arrivait donc qu'en août pour ses congés annuels. Un mois sans le voir m'a paru une éternité. Il est arrivé par le train dans la nuit puisque j'ai entendu des bruits tard.
- «  A la pêche, déjà ?
- «  Ben ouais, tu connais ton père ! »
04 - L'été 1971 (partie 1)C'est le genre de poignard dans le dos, à 10 ans et ½, qui me passent au dessus de la tête...J'engouffre le petit paquet contenant le sandwich sous mon maillot de corps et je file vers le pont. Au bout d'une petite demi-heure de marche sous un soleil de platine, j'aperçois la silhouette paternelle au loin. Pour l'atteindre, il me faut traverser un simple champ d'herbes hautes. Je, donc. A peine au milieu, mes petites jambes s'enfoncent dans des trous de tourbière un peu gluants qui me flanquent une peur du diable : je vais m'enliser dans le dos de mon père, mourir étouffer sans qu'il s'aperçoive de rien... Peut-être même va-t-il s'en ficher ?

mercredi 8 juin 2011

08 - Indian...

10 - Indian...
 
 
Alors lui, c'est "Indiangay" : un blog absolument sublime ! Sensible, doux, et tout et tout... Cliquez sur l'image pour suivre le lien...et venez me dire si j'ai eu tort !

dimanche 5 juin 2011

09 - Naitre

Même si 800 km nous séparent, le retour de Maki me transforme. Même si ce ne sont que des conversations au téléphone, les pièces de la maison s'emplissent à nouveau de sa présence. Et cela est d'autant plus agréable et doux que les nouvelles sont bonnes : son ex n'aura pas de complications, fibromes et polypes étant résorbés suite à l'opération et ne s'étant pas révélés très dangereux après analyses. Les cancers, du sein ou autre, ont ça de particulier qu'ils vous font « toucher du doigt » une putain de facette du parcours de la Vie.
09 - NaitreCurables ou pas, ils sont des drôles de miroirs. De même le Hiv. On hésite à s'y reconnaître. Pourtant, c'est bien soi. Un soi qu'on avait eu tendance, jusque là, à enfouir...pas que les autres l'accusent. Peut-être même, pour certains, cachés à soi-même. De honte. Ou par faiblesse. Ou par paresse.
Lorsque je descendais fumer ma cigarette, le soir, l'esplanade débouchait vers l'entrée de l'hôpital, au loin, là où se couchait le soleil. Et je regardais ces portails inhumains en me promettant de les franchir à nouveau avec cet autre moi-même qui était entrain de naitre dans la douleur. J'aurais juste aimé être moins seul, à l'époque, pour surmonter ce passage.

samedi 4 juin 2011

01 - huān lè (欢乐)



Whaââââouou !!!! Après 3 semaines d'absence, mon mec est enfin revenu ! Vers 22h00 hier soir, il m'a bipé mais je n'étais pas là...
Depuis quelques semaines ici, il fait chaud et cette inhabituelle lourdeur se combine, en ce début juin, avec les premiers concerts des Folies de Maubeuge. Du coup, histoire de me laver la tête de toutes les pesanteurs du quotidien, j'ai été flâné de ce côté-là jusque tard dans la nuit. La fatigue possède cette vertu de vous abrutir et ainsi vous empêche de trop penser à ceux qui vous manquent. En parlant de fantômes, ils s'étaient donné rendez-vous hier soir, ceux-là du passé... Les Bruno, Jean-Michel, Jacques, Doudou et autre Paul...ceux qui hantaient de leurs silhouettes suggestives les remparts d'autrefois. La même chaleur étouffante. La même foule, ignorante des joutes amoureuses qui se déroulaient à l'abri de leurs regards outrés. Sauf que 2011 c'est plus les années 80 : le concert d'hier soir était payant et l'ensemble des remparts avaient été soigneusement barricadés afin d'éviter les resquilleurs...
Ce n'est donc que ce matin que j'ai pu enfin entendre mon tendre ami me susurrer combien il m'aimait, combien je lui avais manqué durant ces trois semaines...combien...combien....le reste est trop intime pour que j'en dévoile quoique ce soit. Putain, JE L'AÎMEUX !!!!! C'est pas du bonheur, c'est de la joie qui se diffuse en moi. 
 
Les Chinois disent "huān lè" :

jeudi 2 juin 2011

03 - Coupable ?

C'est au début des années 60. Je suis né depuis quelques temps et j'ai un problème de phimosis. Opération obligatoire donc. Me voilà le sexe ceint d'une jolie "poupée", si je puis dire... Aucun souvenir de cet épisode chirurgical : trop ancien ou trop traumatisant, impossible à savoir.
03 - Coupable ?
Me voilà, peu après, debout sur une chaise dans la cuisine. Je suis nu, on me fait la toilette. Mon sexe est tout blanc : le pansement le rend épais. Drôle de sensation, ça je m'en souviens.
Elle arrive vers moi. Elle rit très fort. Je me cramponne au dossier de la chaise, je crains le pire. Toutes dents dehors, elle se penche vers moi, tend son index et....."guili-guili" sur le pansement : "Oh la jolie poupée !"
"Elle", c'était une soeur de ma mère. Longtemps j'ai ressassé ces dents blanches qui s'avancent vers mon sexe pour me le couper. A l'adolescence, je me suis senti et prétendu Juif, ce qui est -- encore aujourd'hui -- un motif de fierté. Plus tard, cela m'a valu des sifflets admiratifs de pas mal d'admirateurs. Une castration symbolique et mal vécue, concluera mon psy, bien plus tard encore.
Mais toujours je me suis senti fautif... Coupable ? Non, juste coupé.
03 - Coupable ?

Tu dis ça et t'as l'impression de n'avoir rien dit. C'est compliqué et chiant la Vie.

mercredi 1 juin 2011

01 - Hey, teacher... leave us kids alone !

01 - Hey, teacher... leave us kids alone !Sorti en 1979, il a coulé de source, cet album du Floyd ! C'était exactement mon quotidien : un nid de douleurs et de souffrances. Je me cherchais en fait. Mon père avait la cinquantaine et ne comprenait pas bien que son fils unique soit si "bizarre": pas du tout efféminé, non mais si féminin dans ses réactions... Par exemple, je pleurais beaucoup. Souvent parce qu'un pote s'était éloigné de mon cercle de relations...un type dont j'étais éperdument, secrètement et raide dingue amoureux et que je ne reverrais sans doute jamais...
Alors ces petites briques dont sont faites nos petites Vies, ça m'a percuté illico...et c'est de ces petites briques qui ont construit le bonhomme que je suis aujourd'hui dont je voudrais faire état ici. Le problème étant de savoir si elles protègent ou si elles isolent du monde. La réponse, comme l'entreprise d'ailleurs,  est improbable. Bah, de toute façon, reste que j'adore cet album, comme l'ensemble du Floyd. Associer de la musique à des instants de vie, c'est déjà une façon de ne pas rater La Vie.
01 - Hey, teacher... leave us kids alone !