mercredi 24 août 2011

18 - Erich juillet 81


 19 - Erich juillet 81
17 juillet 81. La matinée est bien avancée lorsque j'émerge enfin de la nuit. Sur la table du petit-déjeuner, une feuille où je lis ce poème.
Accablé par un sommeil profond, je ne l'ai pas entendu quitter le lit. Ni la chambre. Ni la maison. Ni ma vie. Il s'est évadé de mon cœur aussi discrètement qu'il y était entré bruyamment.


Un ami
"Que c'est beau de voir un ami                                               Voir un ami pleurer,
Se reposer à ses côtés                                                             C'est comme entendre chanter la Mort
Sans bouger, sans parler,                                                         Juste à ses pieds,
Comme le fait la nuit,                                                              Narguant le reste de vie qui peut
Bercé par le vent du Nord                                                       Subsister en cet être transi par la tristesse
Qui n'amène que la Mort                                                         Qui n'est que langueur au fond d'un cœur
Car le Nord n'est que le froid                                                  Trop serré, trop asséché
Et le froid ! N'est-il pas Mort,                                                 Par le monde qui ne peut comprendre
Mort dans le cœur, mort dans le corps.                                   Un homme qui recherche l'amour
-----------                                                                                  Au fond de l'Amour ."
19 - Erich juillet 81
Erich. Américain d'origine, il en avait toutes les richesses et toutes les lourdeurs aussi. Son mètre quatre-vingt-quinze, le visage volontaire – parfois buté – une carcasse de rugbyman, faisait de lui un adolescent de 17 ans un peu gauche. Il adorait lutter, les hamburgers, Miami (où vivait son père), Count Basie, le Coca-Cola. Une vraie image d'Epinal !


19 - Erich juillet 81

Une pièce d'un demi-dollar – à l'effigie de J.F.K. – empêchait les courants d'air d'emporter cette feuille. Elle était posée sur sa signature -- E. L. -- au bas droit de la page.

19 - Erich juillet 81

Malgré de multiples démarches, il n'a plus jamais répondu. Ni à mes coups de fil, ni à mes lettres passionnées, ni à mes coups de sonnette à sa porte nazairienne. De cet abandon, en moi a germé peu à peu l'idée d'une non-valeur. Les miroirs ne renvoyaient plus aucune image. J'étais seul, nu, recroquevillé sur un petit caillou au milieu de rien.

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