« Je te souhaite de l'attraper un jour ! »
Le ton, sec, méchant, de Bruno se veut vexatoire. En ce mois de janvier
1993, il tente par tous les moyens de recoller notre couple. Là, il m'a
suivi de loin en cette fin d'après-midi jusque dans ce tunnel où je me
suis engouffré avec une silhouette trentenaire, élancée, prometteuse.
Le
pantalon sur les chevilles, mes fesses tendues à son désir, je dois
prendre appui sur la paroi pour ne pas m'affaler sous ses coups de rein.
Des ombres passent devant l'entrée, presque inconnues. Craintives,
aucune n'osent se joindre à notre joute sexuelle. Parmi elles, celle
plus familière de Bruno, en colère. En colère et en vie pour encore cinq
années, saura-t-on plus tard.
Sur
le moment, cette invective me choque. Peu habitué à ce qu'on m'aime, je
connaissais mal les capacités morbides des amoureux éconduits. Souvent
j'entends encore ces mots, le ton cruel qui n'était que le signe
désespéré d'un amour perdu. Ma mémoire me les ressert à l'occasion,
lorsque je perçois dans mon miroir le mogwaï. Tant de sauvagerie me
laisse pantois, encore aujourd'hui.
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