Nantes
bruyante. Lors de nos promenades, sa menotte crispée bleuissait souvent
mon index. Parfois même, elle s'agrippait à mon mollet. Craintive,
apeurée, la ville la dévorait. Lui montrer combien, même effrayant, le
monde pouvait se plier à soi. Une haleine blanche saccadée s'exhale de
ses lèvres. A 3 ans et demi, enjamber seule le gouffre qui sépare le
trottoir du marche-pied de l'autobus tient de l'exploit. Elle l'a fait.
Toute victorieuse, elle s'est assise côté fenêtre pour dévorer – à son
tour – la ville du regard.
Autour
d'elle, une meute de chacals enragés hurlent à la mort. Elle choisira
le pire d'entre ces collégiens. Mais ange charmant, il saura la
protéger. Ses origines étrangères le recouvrent d'une peau mate,
bronzée, élégante comme ses longs cils noirs, gardiens d'un regard
redoutable mais divin. Elle sait que cette divinité la préservera.
Vingt-trois
ans nous séparent de Nantes, désormais. Sait-elle, aujourd'hui adulte,
combien ces hommes – lui et moi – l'ont aimée ? Pourtant, un bus passe,
mon cœur encore s'affole. Pétri des mêmes regrets à la croisée d'un
regard redoutable.
1 commentaire:
Beau choix de photos. Émouvant.
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