dimanche 21 octobre 2012

04 - septembre 89 (partie 3/3) : Fêlure

p277Cela a dû se produire un samedi soir, sur la fin du mois. Repas de fête : notre dernier vient de fêter ses 8 mois. Les enfants couchés, la télé éteinte, l'appartement tout blanc plonge dans une semi-obscurité. Elle passe à la salle de bain. Sur le parquet, les lamelles des stores découpent des langues de lumière venue des réverbères de la rue. Par jeu, mes vêtements -- au sol -- font des petits tas de rêves. Mes épaisses chaussettes soulignent mes mollets. J'aime.


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Elle sort doucement de la salle de bain. Fraîche, son parfum préféré à la Marilyn. Nos corps bruns se jaugent, s'entortillent l'un l'autre. Quelques pas silencieux vers le lit, ils s'enveloppent dans des draps blancs. Huit mois d'abstinence enfin anéantis...

Repoussé soudain! Violemment. Elle prétexte l'épisiotomie. M'accuse d'incompétence. Un simple mouvement d'humeur ? Douter n'a pas d'importance. Sauf si la réalité vient confirmer ce doute. Stupéfait, je ne réagis pas. Muet. Silencieusement, je me détache définitivement de ce corps. Cette femme devenue mère se refuse comme amante. Cette chair répugnante à jamais. Rejeté, répudié, banni. Mari incompétent ? Qui suis-je alors ? Quelle image de moi dans le miroir le lendemain après la douche ?
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2 commentaires:

André a dit…

Le rejet, alors que l'on ne s'y attend pas, laisse des traces indélébiles.

Guy Zulma a dit…

Le rejet par l'autre en qui on a une confiance totale, engage un processus de destruction de l'identité. D'autant plus redoutable que, ainsi sapée, cela cogne le problème identitaire sur le problème sexuel. L'agglomération des deux problèmes devient alors quasi inextricable.