vendredi 12 octobre 2012

59 – Pulsions








Accoudé au parapet du petit pont, peu à peu s'épaissit le marais. Au-delà de ce gouffre inquiétant – sans fond, croit-il – les lumières de Saint-Nazaire scintillent. Le jeune homme les envie avec intensité, une cigarette volée aux lèvres.
- Là-bas, se dit-il. C'est là-bas que sont mes frères.



Là-bas, aux alentours de ce parc entr'aperçu l'après-midi même par la vitre de la voiture. Il n'a vu personne mais son cœur s'est mis à battre alors. Trop fort pour lui mentir. Il se fait peur :









Ce soir-là, hypnotisé par le spectacle de l'ombre et des lumières, il confond. Peut-être à cause de son jeune âge, il se croit l'âme noire comme ces marécages glauques qui s'étalent à ses pieds. Trop jeune, il ne sait pas regarder. Il ne voit que ce qui se voit. Mille sons – inconnus – autant d'odeurs lui rendent l'âme confuse. Il ignore toute l'alchimie complexe qui le compose et ne peut soupçonner que lui-même soit aussi complexe.



Il ne ressent que la difficulté à gérer à la fois cet appel des lumières où se tiennent ses frères et cet ordre que lui crie son père de la maison. Il doit rentrer, il se fait tard. Il plie à l'ordre, jette son mégot, rentre – incertain du chemin à suivre. Le lendemain, je tenterai d’aplanir mes doutes dans les vestiaires de la piscine en confrontant mon corps de 14 ans à ceux des autres.

Aucun commentaire: