Au fond de cet océan
d'absurdité qu'est la mort de Che-Nen, mes mots tâtonnent à la recherche d'un
sens, mais n'osent. Traitres, ils laissent à la douleur le soin de me cimenter
dans un monde muet, bâti de silences. Et que faire au fond de cette caverne si
ce n'est ce geste ancestral qui sauva l'espèce – nul n'en doute : la main dans
une flaque d'eau charbonneuse puis à la paroi. Laisser une trace : Che-Nen a
existé !
Mais aussi
distinguer, en la nommant, la peur. L'extérioriser, l'extraire de cette foule invraisemblablement
affolante des Morts. Lui rendre hommage. Un dernier. La représenter pour
l'extirper de soi. Ma main s'effacera dans le temps, pas sa trace. L'apposition
de mes mains sur ce corps inerte (avec le secret espoir qu'ainsi fait, un
souffle aurait pu le ramener à la vie ?) reste un regret inassouvi.
Puisqu'il en est
ainsi, soit. Du moins ici sera sa paroi : la trace de son existence. Et la
fierté peut-être de se savoir encore Homme – le corps et l'esprit ainsi
déchiquetés par ces monstres incontrôlés – lutteur pour ma survie (avec le
secret espoir qu'un jour toute cette souffrance cessera. Enfin.), vêtu de ce
seul voile, seul au milieu de la route.
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