mercredi 6 mars 2013

67 - Espoirs secrets



Au fond de cet océan d'absurdité qu'est la mort de Che-Nen, mes mots tâtonnent à la recherche d'un sens, mais n'osent. Traitres, ils laissent à la douleur le soin de me cimenter dans un monde muet, bâti de silences. Et que faire au fond de cette caverne si ce n'est ce geste ancestral qui sauva l'espèce – nul n'en doute : la main dans une flaque d'eau charbonneuse puis à la paroi. Laisser une trace : Che-Nen a existé !




Mais aussi distinguer, en la nommant, la peur. L'extérioriser, l'extraire de cette foule invraisemblablement affolante des Morts. Lui rendre hommage. Un dernier. La représenter pour l'extirper de soi. Ma main s'effacera dans le temps, pas sa trace. L'apposition de mes mains sur ce corps inerte (avec le secret espoir qu'ainsi fait, un souffle aurait pu le ramener à la vie ?) reste un regret inassouvi.





Puisqu'il en est ainsi, soit. Du moins ici sera sa paroi : la trace de son existence. Et la fierté peut-être de se savoir encore Homme – le corps et l'esprit ainsi déchiquetés par ces monstres incontrôlés – lutteur pour ma survie (avec le secret espoir qu'un jour toute cette souffrance cessera. Enfin.), vêtu de ce seul voile, seul au milieu de la route.

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