samedi 6 avril 2013

01 - Tel Thésée

douche13Une mélopée, lente. Un chant sans origine précise qui distille un poison qui vous engourdit l'esprit qui ne sera plus vraiment aussi alerte – on le sait, on le sent bien à ces tout petits riens ridicules, minuscules, qui scrofulent, écrouellent, fistulent chaque jour, les rendant toujours plus invivables mais tout de même vécus : on s'habitue si vite à la laideur honteuse d'une cicatrice mal refermée, n'est-ce pas ? Un chant, donc. Interminable mélopée. La trente-neuvième nuit s'amenuise lentement. Mais le quarantième jour refuse de poindre. Il semble pourtant prometteur puisque, enfin, le labyrinthe se résout. Timidement, un mot après l'autre, une toile, confuse encore, se défroisse et renoue des dialogues. Avec l'un. Avec l'autre. Peu importe mais des inconnus.
eau6Tant de douleurs ruminées, enfin anesthésient. Le visage tordu de souffrances de nouveau, au miroir, s'accepte. Si, ça et là, persistent encore des larmes, ces parfaits quidams ne les relèvent pas, trop polis. En ce sens, parfaits. L'anonymat d'un réseau, antinomie virtuelle, me comble.
La disparition du corps – à jamais emporté par des vagues (chaque instant depuis trente-neuf jours remplit cet office) – se métamorphose en une notion acceptable. Admettre ce dernier regard posé sur moi comme étant le dernier. Et puis, plus rien ? Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien. Rien.









dos


Un son déchire le calme de ce petit matin. Mon homme m'appelle. D'aussi loin – lui aussi réveillé par cette même plainte ? – quarante jours bientôt, et trente-neuf nuits de silence l'inquiètent. Doucement, ses mots chuchotés, un à un, redessinent le souvenir si lointain de son corps noir. Phrase après phrase, le contour de mon amour se précise et m'impressionne. La nuit délaisse enfin la chambre, l'appartement, la ville au-delà. Le jour, tout à fait levé désormais, contraste avec cet amour noir.


gracileUne dernière fois me tourner vers ce passé. Là-bas, à Ishigaki, sur la plage, le vieux souvenir d'un jeune corps échoué. Mais là-bas. Loin d'ici. J'ai connu, il y a une vingtaine d'années, un amour. Maki a raison. Che-Nen doit rester là-bas. C'est bien ainsi. Maki est ma raison.
echoue

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