
J'avais
10 ans et demi et je m'ennuyais ferme dans cette grande maison
bretonne, fraiche au cœur de cet été 1971. Blond comme les blés, bronzé,
yeux bleus. C'est la cousine qui m'a dit, agacée de me voir trainer à
ne rien faire : « va donc voir le petit Joël ! Il habite au calvaire, la
maison blanche juste en face. Lui aussi il s'ennuie. Vous jouerez à
deux ! »
J'ai
pas mis longtemps à le faire sortir de chez lui. Il a fait semblant de
bricoler un vieux vélo, a fini par me demander un coup de main pour me
forcer à me lever des marches du calvaire d'où je l'observais.
Ses
avant-bras étaient tapissés d'un fin duvet de poils noirs et son regard
aux yeux noisette obscurci par des sourcils aussi noirs que de l'encre.
Je me souviens avoir été « impressionné » par sa beauté. Comme l'est
une pellicule par la lumière : ma rétine a reçu sa beauté. Encore
aujourd'hui, je le « vois » parfaitement. Chacun des plis de sa peau
qu'il m'a peu à peu appris par cœur.
C'est
énorme un premier Amour. Même à 10 ans et demi. Joël a orienté toute ma
vie. A tel point que dix-huit ans plus tard, c'est à lui que j'ai dédié
mon mémoire de maîtrise qui portait sur Jean Genet.
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